Je vous invite à faire un exercice sur le Web. Sur un moteur de recherche, écrivez le mot « obésité » puis sélectionnez les images. Vous verrez des troncs sans tête, des bourrelets avec un galon à mesurer, des débordements de masse grasse et des vêtements trop petits.
Le problème, c’est que cette façon de présenter les corps gros* ne correspond pas à la réalité.
Pour ce billet, je vous présente cinq constats sur la façon de présenter les corps gros.
Sur le Web, le tronc sans tête mange presque toujours. Il peut tenir dans ses mains un hamburger à cinq étages, de la pizza, des beignes ou un immense verre de boisson gazeuse. Sur ces mêmes images, lorsque le tronc sans tête est accompagné d’une personne mince, cette dernière semble se nourrir exclusivement de pommes et de laitue, insinuant qu’elle mange bien. À la télé, la personne grosse* mange souvent et rapidement.
Les mots « lutte » et « épidémie » sont maintenant associés à l’obésité. Toutefois, cette lutte contre l’augmentation du poids de la population semble s’être transformée en lutte contre les personnes grosses. D’ailleurs, on mentionne parfois « des obèses », mais ce serait bien de spécifier que ce sont des personnes. Les personnes grosses ont aussi une vie familiale, un travail et des activités sociales, elles ne font pas qu’être grosses.
La façon négative dont les corps gros sont présentés dans les médias renforce les préjugés à l’égard du poids. On présente trop souvent les personnes grosses comme étant paresseuses, pas vraiment intelligentes, peu attirantes et à l’aspect général négligé. Cette façon de présenter les corps gros me semble bien étrange puisque le rendement, l’intelligence, la beauté et l’hygiène personnelle ne sont pas corrélés avec le poids des personnes.
La façon négative dont les corps gros sont présentés dans les médias renforce les préjugés à l’égard du poids.
La personne grosse jugée en raison de son poids pourra avoir tendance à manger davantage, à ne pas se présenter à un examen médical afin d’éviter de se faire sermonner, de même qu’à réduire sa pratique d’activité physique afin d’éviter les regards désobligeants et les critiques. Alors si les personnes grosses sont jugées autant pour leur sédentarité que dans leur pratique d’activité physique, il ne reste aucune option.
Les communications destinées à la population en matière d’obésité devraient cibler des images visant à accroître l’estime de soi, plutôt que de stéréotyper, blâmer ou désinformer. Ces images devraient inclure des hommes et des femmes de tous les âges, d’apparences variées et avec différentes carrières, activités et habitudes de vie. À cet effet, Obésité Canada et le Rudd Center for Food Policy & Obesity proposent des banques d’images adéquates.
Je reconnais les facteurs de risque liés à l’obésité. Toutefois, le fait de présenter des corps gros avec des images dégradantes n’offre aucun avantage.
* Les adjectifs « gros » et « grosse » pour désigner les corps et les personnes sont utilisés sans connotation péjorative. Ils sont préférés à l’adjectif « obèse » qui réfère à l’indice de masse corporelle et dont la mesure s’applique à des populations. De plus, le mot « obésité » est utilisé lorsqu’il concerne des populations et non des individus.
Ce billet a été révisé le 21 septembre 2020. Je remercie Edith Bernier, autrice du livre Grosse, et puis? pour sa collaboration à la révision de ce billet.
K. Gravel et coll. Stigmatisation liée au poids corporel : quoi, pourquoi, comment. Bulletin de santé publique de l’Association pour la santé publique du Québec. 2011;33(2):27-30.
Puhl RM et coll. The stigma of obesity: a review and update. Obesity (Silver Spring). 2009;17(5):941-64.